L’industrie du cinéma et le monde de la littérature sont étroitement liés. Chaque année, on assiste à des adaptations de livres en long métrages ou en fictions, mais également, même si c’est plus rare, des films adaptés en romans. Une idylle cinéma/littérature qui permet de découvrir des scénaristes s’improvisant romanciers, et inversement. De quoi proposer un sacré dilemme à ceux qui se lancent dans le monde de l’écriture : par lequel débuter ?
Lorsqu’on décide de se lancer dans une carrière littéraire ou cinématographique, il est assez fréquent de se projeter sous les différents formats de notre projet. On se prend à rêver d’un roman adapté en télévision ou au cinéma ou d’un film décliné en roman. Cela n’a rien de prétentieux, c’est simplement une confiance en nous qui se manifeste quand notre projet prend forme et qu’on est satisfait du travail accompli. Se pose dès lors la fameuse question :
Dois-je commencer par un scénario pour un film/série, ou directement par un roman ?
Le scénario et le roman partagent l’inconvénient d’être assez énergivores. Consacrer son temps à écrire sur l’un ne prive aucunement de prendre du temps pour écrire sur l’autre, mais que l’on soit novice ou confirmé, il est difficile de pouvoir écrire sur les deux supports en même temps, tant l’écriture d’un roman diffère de celle d’un scénario. Pourtant très proche du romancier dans sa façon de raconter une histoire, le scénariste de télévision ou de cinéma va devoir répondre à des codes précis inhérents au monde de la production cinématographique. Pendant que le romancier aura une large part de créativité dans sa narration, le scénariste devra se plier non seulement à des contraintes vis-à-vis du budget, du temps passé dans chaque scène, mais également aux exigences d’un producteur, d’un réalisateur, souvent d’une chaîne, parfois d’un distributeur et même, occasionnellement, des acteurs. Ainsi, un scénario sera terminé après avoir répondu aux diverses modifications et requêtes. Comprenons par là que le travail du scénariste ne repose pas uniquement sur ses impressions, il doit être validé par un ensemble de personnes. Tandis que l’écrivain, résolument seul face à son histoire, ne devra rendre de compte à personne s’il passe par le stade de l’autoédition. S’il dépend d’une maison d’édition, il devra évidemment répondre à son éditeur.
Un format selon le style d’écriture
Le format choisi dépend également du profil de l’auteur. Si ce dernier est plus habitué au genre cinématographique que littéraire, il aura tendance à décliner son projet, inconsciemment ou non, pour la télévision ou le cinéma. Écrire un livre lorsqu’on n’est pas spécialement attiré par le monde de l’édition peut se révéler très compliqué, de même qu’un écrivain chevronné qui ne comprend pas le monde du cinéma ou de la télévision risque d’avoir du mal à comprendre le fonctionnement d’un scénario. Le style d’écriture peut largement influer sur le format choisi. Un scénario de cinéma ou de télévision bien structuré et bien réalisé peut s’affranchir d’être bien écrit. On ne retiendra in fine que l’originalité de l’intrigue, l’efficacité de la réalisation et la justesse du casting se chargeant de masquer quelques faiblesses dans l’écriture. En revanche, un livre mal écrit ne peut se cacher : cela se verra tout de suite et se répercutera dans les critiques mais également dans les ventes. Ceci étant dit, si le scénario est mauvais, le film sera mauvais, car autant on peut faire un très grand film avec un bon scénario, tout comme on peut aussi le rater, autant on ne fera jamais un très grand film avec un scénario qui ne tient pas la route.
Le roman et le scénario ayant tous deux une structure identique, si l’on reprend la théorie des trois actes, il est dès lors acquis qu’un romancier peut aisément écrire un scénario. Il devra cependant apprendre à répondre aux directives d’un producteur. Si le romancier aura tendance à focaliser son attention sur de nombreux aspects de l’écriture, tels que l’intrigue, le style, le protagoniste principal et le thème, en découvrant le monde de la télévision ou du cinéma, il devra davantage se concentrer sur le ou les personnages principaux et les enjeux. Il faudra absolument qu’il peaufine le début (l’exposition) et la fin de son scénario (la chute), il devra suivre certaines règles (comme l’élément déclencheur ou le climax). En d’autres termes, sa liberté artistique sera bien présente mais assujettie à quelques contraintes.
Le scénariste dans l’ombre, le romancier glorifié
Autre paramètre à prendre en compte : l’audience choisie. Même si roman et scénario racontent une histoire, l’audience n’est pas nécessairement la même. Il est plus facile pour un auteur de fidéliser son lectorat après un roman fructueux qu’un scénariste qui a pourtant pondu un bon scénario. L’auteur sera beaucoup plus exposé, tandis que le scénariste sera éclipsé par le casting et le réalisateur. S’il est possible qu’une quête de gloire soit à l’origine de cette transition, c’est principalement la recherche constante de défi qui motive les romanciers à devenir scénaristes et inversement. En mai 2017, Laëtitia Colombani, longtemps connue pour ses talents de réalisatrice et de comédienne, publie son premier roman, La tresse, qui raconte l’histoire de trois femmes à la destinée différente au Canada, en Sicile et en Inde. Déjà bien connue du monde du cinéma, elle va adapter elle-même son formidable roman en film. Laëtitia Colombani n’est pas la seule scénariste/romancière. On retrouve ce profil avec Romain Gary, Jacques Prevert ou encore Dan Franck, qui a signé presque autant de scénarios que de romans, mais aussi à l’international :
• Agatha Christie : Très célèbre pour ses romans vendus dans le monde entier (Hercule Poirot, Dix Petits Nègres, Miss Marple), la romancière britannique a également écrit plusieurs scénarios pour la télévision dont Le Guépier.
• Michael Crichton : Après avoir connu la gloire avec son livre Jurassic Park, Michael Crichton s’est lancé dans le scénario pour la télévision avec les séries Insight, Pursuit, ainsi que pour le cinéma, avec Westworld, Runaway ou encore Twister. En 1996, il revient à la télévision pour devenir le producteur et le créateur de la série Urgences dont le pilote remontait à 1974.
• F Scott Fitzgerald : Connu pour avoir écrit le best-seller The great Gasby, F Scott Fitzgerald s’est également essayé au métier de scénariste en écrivant notamment Madame Curie.
• Mario Puzo : Avant d’être adapté au cinéma, Le Parrain était un roman écrit par Mario Puzo. Le romancier a ensuite participé à l’écriture du film éponyme pour lequel il a reçu un Oscar. Son talent ne s’arrête pas au Parrain, puisqu’il a coécrit Superman : Le Film en 1978 et Superman 2 en 1980.
• George RR Martin : Fatigué d’être restreint par le manque de créativité en télévision où il était employé comme scénariste, George RR Martin écrit dans les années 1990 la saga Games of Thrones. Cette saga sera ensuite adaptée à la télévision en 2011.
Cette liste est très loin d’être exhaustive tant il y a d’exemples ces dernières décennies. Ils illustrent à quel point la transition roman/cinéma est possible. Choisir quel format est le mieux adapté relève du profil, du style d’écriture et de l’ambition portée au projet. Il convient cependant de bien comprendre les codes de ces deux différentes activités. C’est ici que nous entrons en scène. Pour apprendre comment écrire un roman, ou une série télévisée, n’hésitez pas à vous reporter à la formation Créer des séries TV ou Écrire un roman par Stardust Masterclass, la plateforme dédiée au cinéma, à l’audiovisuel et à l’écriture.